Les cernes profonds marquaient son visage comme une tasse de café laissée trop longtemps sur un parchemin. Un début de barbe poussait par plaques éparses, et ses cheveux tombaient en mèches indisciplinées sur son front et dans sa nuque. Les yeux clairs du Conseiller dansaient le long des lignes, imprimant peu à peu une migraine insupportable en travers de son front. 

La langue sèche de n'avoir pas bu, il écoutait le bruissement du manoir, cherchant la moindre faille exploitable dans son budget pour récupérer quelques précieux millimes. 

S'il ne voulait pas faire crever de faim la moitié de sa famille d'ici la saison froide, il allait sérieusement devoir trouver quelque chose d'utile à faire des Dons chéris par les siens. 

Le bruit métallique de sa porte rafistolée à la va-vite le fit sursauter, et raturer dans la grande largeur une commande de mortier. 

Il pesta, posa sa plume et s'étira, visiblement au bord de l'épuisement. 

Doru : Entrez. 

Ses poings frottèrent ses yeux abîmés. Le chef de famille lissa son veston taché, passa la langue sur ses dents de devant. Le savon avait été distribué aux blessés, aux femmes enceintes et aux infirmes en priorité. 

Aussi son hygiène était-elle, au mieux, douteuse. 

Doru : Vous pourriez commencer par vous annoncer par votre nom. 

Dans le bourdonnement constant du manoir, toutes les voix finissaient par se ressembler, et il était trop fatigué pour faire l'effort d'être aimable.